Le 13 septembre 1958, l’humaniste, visionnaire et dirigeant anticolonialiste, camerounais, Ruben Um Nyobè, se faisait assassiner par l’armée française alors qu’il menait une rébellion armée pour l’indépendance. Jusque dans les années 1990, l’évocation même de son nom était interdite au Cameroun. C’est la mémoire de cette figure emblématique de son pays natal, que Blick Bassy, chanteur camerounais installé en France depuis plus d’une décennie et qui remporte en 2001 le Prix ‘Elysse Musique du Monde’, célèbre dans son quatrième album, ‘1958’, sorti le 8 mars dernier. A travers cet album Blick Bassy souhaite faire sortir le peuple camerounais de cette amnésie collective et le reconnecter à son histoire.
C’est suite à un séjour au Cameroun, il y a deux ans, que l’album a germé dans l’esprit de Blick Bassy. Face à l’instabilité économique, politique et sociale de son pays, il a voulu comprendre le rapport du Cameroun à l’occident. S’inspirant de la vie d’Um Nyobè, mais également de ses écrits ainsi que de ceux d’Achille Mbembe, un philosophe et auteur camerounais, notamment, le chanteur a écrit pas moins de 200 morceaux ! Après un énorme travail de sélection, ‘1958’ compte onze titres, dont ‘Woñi’, ce qui signifie ‘Peur’ en bassa, une langue bantoue parlé par 5% du Cameroun. Ce single poignant est un cri du cœur qui parle de l’incapacité du peuple camerounais à se battre pour sa liberté. ‘Woñi’ est magnifique, intense et riche en émotions. Chantée en bassa et sur un air plutôt gai, le titre évoque le mutisme d’une population qui se réfugie dans l’alcool afin d’exister malgré la peur et la violence. Avec ce morceau, Blick Bassy sollicite les mémoires, pour ne pas oublier l’histoire d’un pays, et d’un continent, encore marqué par son héritage colonial. Le message de Blick Bassy est positif : il faut mieux comprendre son passé et le présent afin de trouver des solutions pour l’avenir de l’Afrique. L’émouvant ‘Woñi’ de Blick Bassy est notre son de la semaine :
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